Le décret relatif à la décentralisation de la gestion des sites Natura 2000 exclusivement terrestres au profit des régions, collectivités cheffes de file en matière de biodiversité et autorités de gestion des fonds européens, est paru le 31 décembre 2022, pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2023. Ce texte d’application de la loi 3DS (article 61), répond à un calendrier contraint, pour ne pas dire "une précipitation manifeste" comme le regrettent les élus du Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) consultés pour avis, et ce compte tenu notamment des nombreuses questions techniques et réglementaires à traiter. Selon la direction de l'eau et de la biodiversité, 1.419 sites font l'objet d'un tel transfert, représentant une superficie totale de 6,26 millions d’hectares. Le décret modifie les dispositions réglementaires concernées relatives à la gouvernance de la gestion des sites Natura 2000 exclusivement terrestres (soit 88% des sites, avec un nombre variable de sites en fonction des régions dans une fourchette de 32 à 260) en y renforçant le rôle des conseils régionaux (art. R. 414-1 et suivants du code de l’environnement).
Un transfert partiel Le président du conseil régional est désormais identifié comme l’autorité administrative des sites Natura 2000 exclusivement terrestres. Dans le cas de sites interrégionaux, une convention est conclue entre les régions concernées pour désigner celle qui assurera le rôle d'autorité administrative. Dans les cinq régions qui ne comptent que des sites terrestres, la décentralisation porte donc sur l’ensemble du réseau. Dans les huit autres régions, la gestion du réseau est en revanche partagée avec l’État, qui conserve la main sur les sites maritimes, y compris pour les zones mixtes. Le texte élargit également la consultation des collectivités concernées préalablement à la notification d'un projet de périmètre (ou de modification de périmètre) aux conseils régionaux (ou en Corse, à la collectivité de Corse) pour les sites exclusivement terrestres. Cette consultation ne relève pas d'un transfert de compétence, mais permet à la région de donner son avis sur la désignation d'un site dont elle aura à assurer la gestion. Les missions de désignation des sites Natura 2000 ainsi que l’instruction des évaluations des incidences Natura 2000 (EIN) ne font en effet pas partie du périmètre de la décentralisation.
Approbation du document d’objectif C’est à ce niveau que se situe le transfert à proprement parler. Le président du conseil régional se voit désormais confier le rôle d’autorité administrative (auparavant occupé par le préfet de département) s’agissant de la constitution du comité de pilotage (Copil) du site Natura 2000, ainsi qu'à défaut de collectivité territoriale volontaire pour l’assurer, la présidence du Copil. Le document d'objectifs (Docob) élaboré par le comité de pilotage Natura 2000 est par ailleurs soumis à l'approbation du conseil régional, qui peut, s'il estime que le document ne permet pas d'atteindre les objectifs qui ont présidé à la création du site, demander sa modification. En outre, dans le cas où celui-ci ne serait pas soumis à approbation dans les délais requis par le comité de pilotage, c’est le président du conseil régional qui arrêtera le document d’objectifs. Point de difficulté : l’état de rédaction ou de révision des Docob diffère d’une région à l’autre. C'est aussi avec le président du conseil régional que seront conclus les contrats, dans lesquels seront fixées les aides publiques en contrepartie desquelles sont mises en oeuvre des mesures de préservation des sites.
Réévaluation du volume des effectifs initialement annoncés** La compensation financière des fractions d’ETP (équivalent temps plein) remplissant les missions transférées a fait partie des points d’inquiétude soulevés par les régions. A la suite d’une enquête menée auprès des Dreal (directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement), 50,43 ETP ont été recensés au titre de la compensation des fractions d’effectifs, contre 86 ETP estimés selon le chiffrage établit par Régions de France. A la suite des concertations menées, il a finalement été convenu de réviser à la hausse le nombre d'ETP faisant l’objet d’une valorisation financière dans le cadre de la loi de finances pour 2023 (article 112). Il a ainsi été décidé de porter le volume total des effectifs compensés à 65 ETP. Le texte en tire les conséquences en intégrant au montant du droit à compensation initial les charges relatives aux 14,57 ETP complémentaires. A compter du 1er janvier 2023, le montant de cet ajustement s’établit à 643.688 euros, portant le droit à compensation total transféré aux régions à hauteur de 2 845.020 euros. Un nouvel ajustement pour fixation définitive du montant de compensation et de sa répartition n’est cependant pas exclu au cours d’une prochaine loi de finances… Notons enfin que le décret corrige ou actualise au passage diverses dispositions réglementaires, en particulier sur les évaluations des incidences Natura 2000 des plans, programmes ou projets aux articles R. 414-19 et R. 414-27 relatif au régime d’autorisation propre à Natura 2000. Il simplifie en outre certaines procédures, en prévoyant notamment la dématérialisation de la notification des arrêtés de désignation de sites Natura 2000 aux maires des communes concernées.
Retrouvez ICI une infographie synthétisant le transfert de compétence